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Récit : M/T Kiribora

Perdu au milieu de l’Ocean Pacifique subsiste depuis prés de 10 ans, le Kiribora, un pétrolier battant pavillon français et voué à l’approvisionnement en hydrocarbures de quelques uns des territoires français les plus reculés. Armé par la Socatra et affrété par Total, ce navire de 183 mètres et de 50 000 tonnes de port en lourd navigue sur une ligne assez régulière en chargeant en Corée du Sud et en déchargeant en Nouvelle Calédonie, aux Fidji et à Tahiti. Pour cet embarquement j’ai rejoins le navire à Papeete, après les 18h de vol séparant l’île polynésienne de la capitale. L’équipage est international, seul le commandant et un autre élève sont français, les officiers sont lettons et philippins, le bosco est lituanien et les matelots philippins. Lorsque nous partons de Tahiti le navire est presque vide, il reste dans nos cuves quelques lots de diesel à destination de Nouméa en Nouvelle Calédonie que nous mettrons six jours à rejoindre. Le début de l’embarquement est classique, les journées sont rythmées par les familiarisons en tous genres (équipements de la passerelle, opérations cargo, équipements de sécurité, safety tour du navire et exercice d’abandon pour les nouveaux arrivants). La navigation dans l'Océan Pacifique est très tranquille, durant les cinq premiers jours nous ne croiserons qu’un seul navire.

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Le quart à la passerelle étant un peu « la planque » dans ces conditions, nous sommes rapidement, avec un autre élève pont qui lui est roumain, envoyés bosser avec les gars sur le pont. Le lieutenant sécurité ayant embarqué avec nous à Tahiti doit vérifier tous les équipements du navire en prévision d’une future inspection par le BV (Bureau Veritas) et d’un vetting (audit réalisé par l’affréteur, ici Total. Le vetting est propre aux navires citernes). Nous passerons donc une grande partie des jours en mer, sous la supervision du lieutenant et du Second et aidé par le bosco (maître d’équipage) et des matelots philippins à remettre en excellent état une grande partie du système incendie : vannes, canons a mousse etc.

La première traversée marquera également le franchissement de la ligne de changement de date. Nous passerons donc du 180° Ouest au 180° Est, sautant ainsi une journée.

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Arrivés en Nouvelle Calédonie nous passeront 24h au mouillage dans la Baie de Prony a l’extrême sud de l’île afin d’attendre la réception d’une pièce pour la machine. Nous reprendrons le pilote en fin d’après midi pour un chenalage de 3h dans le lagon calédonien. L’opération de déchargement en baie de Nouméa sera très rapide. Nous ne sommes pas à quai mais sur « coffres ». Six coffres flottant entourent le Kiribora, trois devants et trois derrières. Nous y sommes amarrés et un flexible sous-marin vient directement se connecter à un de nos manifolds. Le départ sera rapide et nous sortons du lagon par la passe de Nouméa. A cette saison les baleines sont courantes dans le lagon calédonien. Complètement vide et avec les ballasts remplis nous mettons cap sur Onsan en Corée du Sud. 12 jours de navigation seront nécessaires pour passer de 22° Sud à 35° Nord. La remontée du pacifique se fait sans encombre, l'Océan Pacifique se montre particulièrement clément en cet été, malgré un roulis prononcé du navire.

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Dès le départ du port Calédonien nous nous attelons aux lavages des citernes. Il est prévu que nous chargions du kérosène en Corée et pour ce produit les citernes doivent être impeccable sans résidus de produits transportés précédemment.  Le lavage se fait en plusieurs étapes. Afin d'éviter le phénomène d'électrostatique (et aussi l'explosion du navire) lors de l'envoie des jets d'eau, les cuves doivent être ventilées un certain temps avec du gaz inerte (très pauvre en oxygène) afin d'être sur qu'il ne persiste aucun gaz issus des produits. Une fois ceci réalisé, les jets d'eau fixés au plafond des citernes les lavent entièrement. Les eaux de lavages sont ensuite enlevées des cuves et transférées dans des cuves spéciales de stockage.

Ensuite les citernes sont ventilées à l'air ambiant, "mise sous air", afin que sous la responsabilité du Second Capitaine nous puissions y descendre. L'objectif est de terminer manuellement à l'aide de torchons et de balais, de vider le dernier centimètre d'eau subsistant au fond de le cuve. (Celle ci à une profondeur de 18 mètres).

Cette manipulation nous prendra deux journées et pendant ce temps la nous passerons, en direction du nord, différentes iles : Bougainville, les Iles Salomon, la Nouvelle Irlande. C'est dans cette zone que nous franchirons l'Equateur et feront le traditionnel baptême. 

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Fin août, arrivée en Corée du Sud. Une dépression ayant frappée la zone peu avant notre arrivée, le port d’Ulsan est fermé. Il n’est pas possible de mouiller pour le moment nous restons donc à la dérive pendant une journée au milieu d’une dizaine d’autres navires dans une brume épaisse. L’image parfaite de ce qu’on peut se donner du temps asiatique ! Finalement le port rouvrant ses portes nous irons mouiller au chausse pied au milieu des autres pétroliers. Trois navires doivent occuper le quai avant nous, nous resterons quatre jours au mouillage. Durant ces quatre jours nous déchargerons les poubelles, nous recevrons les vivres pour les deux prochains mois, des pièces pour la machine et nous accueillerons toutes sortes de techniciens coréens, notamment pour des travaux sur l’ECDIS (carte électronique). A noter que le Kiribora était le dernier navire de la flotte  à avoir un ECDIS en moyen secondaire de navigation. La carte papier était donc encore de rigueur à bord ! 

Après 48h de chargement nous quittons la Corée pour mettre cap sur le sud du Japon et rejoindre le Pacifique. Nous voguons vers Vuda au Fidji. 13 jours de navigation sont nécessaires pour retraverser le Pacifique dans le sens inverse, nous en mettrons 15 à cause d'un fort vent de face durant les premiers jours.

La traversée est rythmée par les quarts en passerelle et les travaux sur le pont. Nous repasserons l'Equateur une seconde fois au sud des Iles Mariannes, près de l'endroit le plus profond du monde. Nous passerons également le volcan Pagan, un des nombreux volcans encore en activité dans cette région du monde. 

L'arrivée au Fidji se fera au petit matin. Dans le Pacifique nombreuses sont les iles où les manœuvres ne peuvent se faire que de jour. Nous nous présentons à 6h à l'entrée du lagon pour embarquer le pilote. Les passes étant étroites, seul un navire peut pénétrer dans le lagon, les autres devant attendre leur tour de pouvoir franchir les passes. Encore amarrés sur coffre, l'escale à Vuda sera d'une demie journée seulement. 

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Après Vuda, nous rejoindrons une nouvelle fois Tahiti après cinq jours de mer et où je débarquerai après deux mois.

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